Comment former efficacement un collègue sur son poste de travail ?
Les clés pour structurer les messages clés et transmettre ton expertise en dehors de toute action de formation formelle.
Bonjour 👋
Bienvenue dans cette 31e édition (!) de Superformateur.
(Cette semaine, cette édition s’adresse principalement aux experts métiers qui, sans être formateurs de métier, transmettent régulièrement leurs compétences à leurs collègues, de manière informelle et en situation de travail).
Tu as déjà été sollicité(e) à l’improviste par un collègue qui te demande :
« Tu peux me montrer comment tu fais ? »
Pas de salle, pas de support,... il ne s’agit pas de former officiellement ton collègue mais il s’agit pourtant d’un acte de transmission.
(Et il mérite d’être pensé comme une formation).
Dans cette édition, tu découvriras comment transformer un échange spontané en moment d’apprentissage.
On y va ?
Transmettre de façon informelle : un acte pédagogique à part entière.
Dans les entreprises, la compétence ne circule pas uniquement via les actions de formation formelles et peut également se diffuser au quotidien, entre collègues, dans des contextes variés :
Intégration d’un nouveau collaborateur,
Résolution de problèmes,
Partage de méthode(s) pour réaliser une tâche, un geste technique,…
Débrief rapide après une action ou une situation concrète.
Souvent, ces échanges se font hors cadre, c’est à dire en dehors de toute action de formation formalisée (hors plan de développement des compétences, sans durée définie, sans préparation pédagogique préalable,…).
Et pourtant, leur impact doit être fort car ce sont des moments de transmission contextualisés, concrets, souvent très proches des réalités du terrain.
Mais ces moments apprenants présentent aussi un risque majeur : celui d’une transmission incomplète, floue et/ou même parfois biaisée.
Ce que l’expert fait intuitivement peut être mal compris, mal retenu ou mal répliqué s’il ne l’explicite pas clairement.
Transmettre sans dispositif formel : des bases pédagogiques à préserver.
D’accord, ton collègue n’est pas en formation. Cependant, dans cette situation, en tant qu’expert métier, tu adoptes une posture de formateur.
Voici les bases pédagogiques à mobiliser, même dans en situation de transmission informelle :
1) Avoir une intention claire (même si elle n’est pas formalisée).
Quand tu transmets une compétence sur le moment, tu dois clarifier en amont (ou dans les premières secondes) :
Ce que la personne attend (observer, apprendre, être accompagnée ?),
Ce que tu es en capacité de lui transmettre ici et maintenant,
Le niveau de profondeur souhaité : simple présentation ? démonstration commentée ? entraînement guidé ?
Ce cadrage t’aide à rester efficace, sans t’éparpiller. Et surtout, il te permet de ne pas projeter ton niveau d’expertise sur quelqu’un qui n’en est pas là.
2) Expliciter ce que tu ne dis jamais d’habitude.
C’est le cœur du travail pédagogique dans ces moments : rendre visibles les compétences invisibles
Quand tu réalises une tâche, tu enchaînes des micro-gestes, tu fais des choix, tu appliques des règles mais tout cela est naturel voire “internalisé”. L’autre ne voit que le résultat, pas le raisonnement.
Pour bien transmettre, tu dois donc :
Verbaliser tes intentions (“je commence par vérifier ce champ, car…”),
Décomposer tes actions (“d’abord je filtre, ensuite je trie, puis je priorise…”),
Mettre en lumière tes critères (“ce qui me fait dire que c’est un bon dossier, c’est…”),
Formuler les alertes implicites (“si tu ne vois pas cet indicateur, arrête-toi tout de suite”).
3) Segmenter et structurer (même à l’oral).
Sans support, sans plan écrit, la structure de ton propos devient encore plus importante. Tu dois donc donner des repères mentaux à la personne en face.
Exemples :
“Je vais te montrer ça en trois temps”,
“Il y a deux règles à retenir ici”,
“Le piège classique, c’est celui-ci”,
“Ce qui compte le plus, c’est…”
Cette structure orale permettra à ton interlocuteur de mieux mémoriser, savoir où il en est dans l’explication et hiérarchiser les informations.
Ce balisage transforme un discours fluide en contenu formateur.
4) Maintenir une posture d’ajustement permanent.
Dans une formation classique, en tant que formateur, tu observes les réactions, tu poses des questions, tu évalues la compréhension,…
Dans le cadre d’une transmission informelle, ces points de repère sont (trop) souvent absents si tu ne les crées pas.
Voici quelques réflexes utiles que je te recommande d’adopter :
Demander : “Tu veux que je le refasse ?” ou “Tu veux tester maintenant ?”,
Valider : “Tu vois pourquoi je fais ça dans cet ordre ?”,
Ouvrir : “Tu aurais fait différemment ? Qu’est-ce que tu en penses ?”
Ces micro-interactions t’évitent de faire un monologue inutile, descendant et favorisent un ancrage actif.
Des gestes pédagogiques concrets pour renforcer l’impact.
Je te partage maintenant des pratiques concrètes, que tu peux intégrer immédiatement dans tes échanges pour en augmenter l’impact pédagogique.
Faire un pas de côté avant d’agir :
Très important.
Avant de “montrer comment tu fais”, pose une question :
“Qu’est-ce que tu connais déjà sur ce sujet ?”
Cela t’évitera deux écueils que j’observe souvent :
Refaire une explication inutile,
Aller trop vite sur ce qui n’est pas compris.
Tu crées ainsi une connexion entre le point de départ de ton interlocuteur et ton niveau d’expertise.
Montrer ET commenter :
Ne te contente pas de reproduire un geste ou d’effectuer une action sous les yeux de ton collègue.
Commente ce que tu fais au moment où tu le fais, comme un sportif qui expliquerait sa technique pendant qu’il court.
Exemple :
“Je clique ici, pas là, parce que ce champ est pré-rempli et il peut fausser les données.”
Tu assureras alors une double exposition :
Visuelle (voir comment tu fais),
Cognitive (comprendre pourquoi tu fais ça).
Laisser une micro-marge d’essai :
Même si le contexte est rapide, laisse la personne manipuler, tester, se confronter et faire des erreurs,…
“Regarde si tu arrives à faire le tri selon les critères que je t’ai montrés”.
“Tu veux essayer de le reformuler comme tu l’as compris ?”
Ce mini entraînement est une étape souvent négligée, mais c’est elle qui permet l’ancrage. Celui “qui fait” comprend mieux que celui “qui observe”.
Conclure par un message fort ou une règle utile :
Ne termine jamais par “Voilà, c’est bon”. Propose un point d’appui clair et mémorisable, par exemple :
Une formule-clé (“Toujours valider avant de publier”),
Une erreur à éviter (“Le piège, c’est d’aller trop vite sur l’analyse sans vérifier les sources”),
un rappel de logique métier (“Ici, la priorité, c’est la sécurité, pas la vitesse”).
Tu laisses ainsi une trace mentale forte.
Si possible, laisser une trace écrite minimale :
Même en situation de transmission informelle, un échange mérite parfois une trace écrite pour prolonger la transmission :
Rédige un mail de synthèse,
Envoie une capture annotée,
Partage un post-it avec les grandes étapes clés,
(…)
En conclusion, transmettre en dehors des cadres formels ne veut pas dire former “au rabais”. Ce format de transmission est exigeant, vivant, où ta posture, ta clarté et ta capacité à t’ajuster feront toute la différence.
En appliquant quelques principes simples, tu transformes un échange ordinaire en moment formateur, tout en contribuant activement à faire grandir les compétences dans ton entreprise.
Voilà, c’est tout pour cette édition.
On se retrouve la semaine prochaine pour le décryptage d’une nouvelle pratique.
À très vite,
— Quentin 💌
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